Leonard Menchiari avait un rêve. Un script parcellaire, gribouillé sur une feuille, à l'arrache. Sans doute après un énième marathon des films d'Arika Kurosawa, remarquez. Des bribes de scénario, impliquant un apprenti samouraï, une quête vengeresse et une bonne dose de fantastique empruntant au folklore japonais. Un rêve, que l'éditeur Devolver Digital lui a permis de concrétiser avec Trek to Yomi.
Deuxième jeu du réalisateur après le confidentiel The Eternal Castle, Trek to Yomi n'a toutefois pas été fabriqué seul. Les trublions de Flying Wild Hog (Shadow Warrior 3) ont été appelés à la rescousse pour donner corps à un sympathique (mais imparfait) jeu d'action-aventure dont la patte graphique dénote dans le paysage actuel.
6
- Une esthétique mémorable
- Des combos au sabre variés
- Sound design réussi
- Quatre niveaux de difficulté pour s'adapter à tous
- Des animations trop rigides
- Combats parfois un peu maladroits et ennuyants
- Scénario oubliable
- Un jeu un peu trop long pour son propre bien
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Katana plus, y'en a encore
On sait pertinemment ce que vous vous dites. « Ah oui, Ghost of Tsushima, je connais ». Mais le fait est qu'à part une esthétique très cinématographique et un ancrage dans une certaine représentation du Japon féodal, la comparaison peut s'arrêter ici. Bon, ok. Il y a aussi des katanas.
Hiroki est un apprenti samouraï qui assiste à la mort de son senseï lors de l'attaque d'un groupe de bandits dans son village natal. Un événement traumatique, qui ne fera que redoubler le sens du devoir du jeune padawan, qui jure alors de protéger son village contre tous les dangers.
Vous l'imaginez bien, les choses ne vont pas se passer comme prévu. Plus âgé mais pas moins naïf, Hiroki tombe dans un piège qui éloigne du village son seul protecteur. Comprenant que son foyer est en train d'être réduit en cendres, le samouraï entame un périple à travers forêts et villages pour retrouver l'auteur du massacre. Et gare à celui qui se dresse sur son (notre) passage.
Je vous le concède, on a vu plus original. Autant le dire : l'écriture n'est certainement pas le point fort de Trek to Yomi. On nous sert une histoire déjà vue mille fois — notamment si l'on est amateur ou amatrice de films du genre.
Installée sur peu de personnages, l'intrigue du jeu ne nous laisse pas vraiment l'opportunité de nous y attacher. On pourra occasionnellement tailler la bavette avec des habitants apeurés, mais ça s'arrête là. La particule narrative du titre aurait gagné à être davantage appuyée tant l'esthétique du jeu se prête à une immersion grandiose.
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Bullshito Blade
Mais comment ça se joue, Trek to Yomi ? Tout bêtement : comme un jeu d'action à la troisième personne en défilement horizontal.
Hiroki se déplace à travers différents (et toujours somptueux) tableaux en noir et blanc et affronte les adversaires qui lui barrent la route. Le système de combat est sommaire, tout en étant étonnamment complexe.
Comme un bon vieux beat them all, Trek to Yomi vous propose de mémoriser différents combos qui permettent notamment de se sortir d'une situation délicate (les ennemis n'hésitant pas à attaquer à plusieurs). On pourra par exemple pivoter rapidement en donnant un coup large, et enchaîner avec un estoc. Ou encore asséner plusieurs coups rapides pour déstabiliser l'adversaire avant de le décapiter d'un finish sanglant. Une mécanique de blocage et de parade (très gentille) est aussi au menu, et permet au passage de regagner quelques points de vie.
Il existe de nombreux combos à découvrir en parcourant le monde qui, même s'il n'est absolument pas ouvert, cache çà et là quelques petits passages secrets permettant de les apprendre. C'est aussi en sortant du chemin principal qu'on trouvera de quoi améliorer sa jauge de vie, d'endurance, ou des munitions supplémentaires pour les quelques armes secondaires à notre disposition.
Le problème est que si Trek to Yomi ne manque pas d'impact (surtout sonore) dans son approche du combat, il nous met rarement à l'épreuve. À de rares exceptions (certains types d'ennemis un peu pénibles), on aura tendance à rouler sur le jeu en difficulté normale. Passé un certain stade, une technique de combat permet même de se défaire du moindre bandit en un coup.
Est-ce rédhibitoire ? Pas du tout. Mais le jeu de Leonard Menchiari n'est pas avare en combats, et on finit par bâiller poliment au bout du 100ᵉ crétin qui vient s'empaler seul sur notre lame. Heureusement, ça laisse à l'œil tout le loisir de scruter le paysage dans ses moindres détails.
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Cinéma d'art et d'épée
S'il y a un aspect sur lequel Trek to Yomi est imprenable, c'est bien sa photographie. Leonard Menchiari vient du cinéma, et ça se voit. Chaque plan est minutieusement travaillé, et le contraste ravageur du noir et blanc vient en sublimer les détails tout en alourdissant la charge dramatique de certaines scènes.
Le réalisateur n'hésite d'ailleurs pas à varier les focales et les placements de caméra... au point de renoncer, parfois, à la lisibilité des combats. On le pardonne tant la variété des points de vue est à saluer et vient, momentanément, nous faire oublier que nous sommes solidement ancrés sur des rails tout au long de l'aventure.
D'autant que si la première partie de Trek to Yomi nous sert des décors et une scénographie assez commune ou, au moins, attendue pour un jeu de samouraï, il se déride sur sa deuxième partie pour nous emmener — comme son nom l'indique —, à Yomi. Le royaume des morts.
Je n'en dirais pas plus pour ne rien divulgâcher, mais Trek to Yomi doit probablement ses meilleures idées visuelles à ces inspirations shintoïstes appuyées. On sent d'ailleurs un réel intérêt du réalisateur pour la chose ; le jeu ne manquant pas de babioles à ramasser le long du chemin afin d'en apprendre plus sur certaines divinités du folklore japonais.
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Trek to Yomi : l'avis de JVFR
6
Malheureusement, ce lustre esthétique se conjugue à une particule de gameplay branlante et à des animations d'une rigidité mécanique qui le desservent.
À peine trop long pour son propre bien, Trek to Yomi reste un titre largement recommandable à celles et ceux qui tiennent le cinéma japonais des années 50 et 60 en haute estime. Sur ça, le pari de son créateur est tenu, et bien tenu.
Les plus
- Une esthétique mémorable
- Des combos au sabre variés
- Sound design réussi
- Quatre niveaux de difficulté pour s'adapter à tous
Les moins
- Des animations trop rigides
- Combats parfois un peu maladroits et ennuyants
- Scénario oubliable
- Un jeu un peu trop long pour son propre bien