Test de The Eternal Cylinder : le rouleau compresseur indé

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Test de The Eternal Cylinder : le rouleau compresseur indé

Benjamin Logerot

18 octobre 2021 à 08h48

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©Epic Games Store
©Epic Games Store

Annoncé en 2019, The Eternal Cylinder, le 8e jeu des chiliens de ACE Team, a presque immédiatement retenu l'attention d'une frange des adeptes de jeux indépendants. L'univers dépeint dans ses trailers et la proposition originale qu'il nous exposait (un jeu de survie avec des petites créatures poursuivies sans cesse par un cylindre géant) avait de quoi faire se lever quelques sourcils surpris et intrigués. Le jeu est finalement sorti le 30 septembre dernier et il n'est pas exagéré de dire que c'est nouvelle pépite offerte par le monde du jeu vidéo indépendant, principalement grâce à sa direction artistique incroyablement originale, mais aussi pour ce qu'il propose en termes de gameplay.

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The Eternal Cylinder
  • Le design des créatures
  • Les possibilités offertes par les mutations
  • Une histoire prenante
  • L'un des jeux les plus originaux de l'année
  • Le gameplay parfois approximatif
  • Trop d'ennemis
  • Peu de challenge offert par les puzzles

The Eternal Cylinder a été testé sur une version PC via un code fourni par l'éditeur. The Eternal Cylinder est sorti le 30 septembre 2021 sur l'Epic Games Store, PlayStation 4, Xbox Series S|X et Xbox One.

Période : inconnue. Planète : inconnue. Tout ce que l'on sait en lançant The Eternal Cylinder c'est un narrateur à la voix reposante, qui nous accompagne tout du long, qui nous l'explique. Une peuplade de petites créatures primitives appelées Trebhums tente tant bien que mal de survivre dans la nature impitoyable de leur foyer. Autrefois évoluée, l'espèce est rapidement retombée à l'état de proies sans défense lorsque le cylindre éternel et ses sbires ont envahi leur planète, détruisant alors absolument tout sur leur passage. A nous, joueurs, d'essayer de faire survivre l'espèce en recouvrant leur savoir quasi oublié et en essayant de percer les secrets du cylindre pour le combattre dans son avancée inexorable.

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Bizarre autant qu'étrange

On ne va pas y aller par quatre chemins, la force de The Eternal Cylinder repose en grande partie sur sa proposition visuelle et le travail apporté aux différents designs artistiques des éléments du jeu. Le titre d'ACE Team détonne complètement dans le paysage vidéoludique actuel et cela fait un bien fou. Les choix radicaux opérés par l'équipe de développement ne sont pas des premières chez eux. On a l'habitude de voir ACE Team dans ce genre de manœuvre consistant à nous offrir des choix artistiques très impactant notamment sur leurs séries des Zeno Clash ou Rock of Ages. Il est encore plus intéressant de savoir pourquoi ces petits développeurs chiliens en arrivent à de tels résultats.

Le monde de Eternal Cylinder est rempli de créatures au design original
Le monde de Eternal Cylinder est rempli de créatures au design original

Nous venons de le dire, l'équipe, dirigée par les frères Andres, Carlos et Edmundo Bordeu, est chilienne. Depuis les débuts du studio en 2002, la situation complètement excentrée par rapport au « centre du jeu vidéo mondial » des développeurs les a amenés à se dépasser et à proposer des choses encore jamais vues, pour qu'on les remarque (les joueurs comme les éditeurs) au-delà de leurs frontières. Un pari et surtout un combat gagnant qui s'est inscrit dans la durée dans l'ADN du studio. En cela on peut dire que The Eternal Cylinder est totalement en accord avec leur esprit, et est un projet perfectionné - grâce au soutien de l'éditeur Good Shepherd notamment - regroupant des années de développement artistique. C'est pourquoi on peut retrouver dans le design des créatures, du monde ou dans le gameplay de Eternal Cylinder quelques similarités avec ce qui a été fait sur leurs projets précédents.

Chaque instant des 12h nécessaires pour terminer le jeu a été une gifle d'originalité. Le monde généré procéduralement, séparé en différents biomes, regorge de détails aussi farfelus les uns que les autres. La faune est ultra diversifiée et propose tantôt de gigantesques fleurs pointant vers les nuages, tantôt des arbres incrustés de boules fluorescentes, ou encore des saules bleu argent qui viennent chatouiller de leurs branches des petites fleurs à pics. Mais vraiment, là où se démarque Eternal Cylinder, c'est dans son character design. Tout au long de l'aventure et des biomes parcourus, on croise un grand nombre de bestioles et autres monstres aux airs souvent étonnants. Mention spéciale au Mathématicien (le plus important ennemi du jeu) et ses sbires qui combinent un aspect que nous appellerons sans hésiter « humanoïdo-automobile » qui participe grandement au stress engendré lorsque notre groupe de Trebhums tombe sur eux.

Le Mathématicien est de loin la créature la plus étrange
Le Mathématicien est de loin la créature la plus étrange
Et ses sbires ne sont pas en reste
Et ses sbires ne sont pas en reste

Un stress dû au fait qu'on est très régulièrement harcelé par tous ces ennemis qui n'hésitent pas à nous pourchasser sur de grandes distances s'ils nous repèrent, accompagnés par des thèmes musicaux de grande qualité (comme toute la musique du jeu d'ailleurs, composée par Patricio Meneses, le compositeur en interne du studio) propres à chaque ennemi. Mais ce harcèlement devient parfois vite très lourd et peut nous empêcher pendant de longues minutes d'explorer les zones puisqu'on est trop occupé à fuir pour conserver l'intégralité de notre groupe de créatures et nos mutations, qui peuvent facilement disparaître si on ne fait pas attention, nous obligeant alors à en chercher d'autres.

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En bande organisée

Mais une fois tranquille, pourquoi fouiller les petites zones ouvertes ? On ne l'a toujours pas dit, mais qu'est-ce qu'on doit faire dans le jeu ? Ce n'est pas simple à expliquer, mais dans les faits, en jeu, tout s’emboîte bien et il est aisé alors de bien tout comprendre. Il est possible d'incarner n'importe quel Trebhum de notre groupe quand on le souhaite. Il faut alors chercher dans le monde de quoi se nourrir, de quoi boire (jeu de survie oblige, on n'échappe pas aux fameuses jauges de faim, d'endurance et d'eau) et, surtout, de quoi muter !

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Les petites zones à explorer librement nous immergent dans un univers prenant

En aspirant avec leur trompe des ressources spécifiques, que ce soit de la faune ou de la flore, les Trebhums, un peu à la manière d'un SPORE, peuvent muter et ainsi gagner des habilités qui seront vitales pour survivre pendant le jeu. Ces mutations impactent pour la plupart directement le gameplay alors que d'autres sont plus passives, mais non moins importantes. Par exemple, il est possible de pouvoir sauter plus haut, de se gonfler de gaz pour flotter, de cracher un nuage de fumée, d'être plus discret, de faire sonner sa trompe, de filtrer les vapeurs toxiques ou se protéger du froid, etc. De nombreuses mutations sont disponibles, qu'il est possible de combiner sur nos Trebhums afin de créer des petites créatures uniques d'abord physiquement (chaque mutation modifie l'apparence) mais aussi par leurs capacités.

Toute l'avancée du jeu tourne autour de ces mutations et il n'est pas étonnant de retrouver des temples qui obligeront à tirer le meilleur parti de nos mutations pour résoudre leurs puzzles (franchement pas compliqués), ou des boss qui demanderont une bonne utilisation des capacités pour leur survivre. L'histoire même de Eternal Cylinder tourne en partie autour des mutations puisque la capacité d’absorption des Trebhums est ce qui les rend aussi importants, malgré leur petite taille, pour combattre le cylindre.

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Chaque mutation modifie l'apparence des Trebhums

On s'amuse donc tout au long de la partie à arpenter les zones ouvertes à la recherche des fameuses mutations et de les essayer sur nos créatures pour trouver des combinaisons intéressantes et stratégiques. Car oui, le jeu d'ACE Team possède une dimension bien stratégique avec la gestion de notre groupe de petits êtres. Chaque Trebhum, sauf mutation particulière, possède trois emplacements pour stocker des ressources différentes. Ça fait peu, c'est pourquoi il est important d'avoir un groupe le plus large possible pour, entre guillemets, avoir un plus gros inventaire. Mais posséder plusieurs Trebhums permet aussi d'avoir plus de possibilités de mutations et de spécialiser ses créatures.

Il est par exemple judicieux d'avoir dans sa troupe un Trebhum qui peut convertir automatiquement tous les minéraux qu'il aspire en points d'expérience, à dépenser pour améliorer ses capacités générales, recruter de nouvelles créatures ou pour ramener les compagnons disparus à la vie ; et un autre qui transforme la flore en eau. Un Trebhum pourra être spécialisé dans le combat (à éviter tout de même) en pouvant créer et jeter des petites bombes et en le camouflant, tandis qu'un autre aura toutes les capacités pour nager sans perdre sa barre d'endurance en 10 secondes, lui évitant une mort par noyade.

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L'arbre des mutations permet, moyennant des ressources spécifiques, de débloquer de manière définitive des capacités

Bref, c'est à chacun et chacune de faire comme il l'entend, le jeu ne proposant pas de « bonne » ou de « mauvaise » combinaison. Il faut simplement faire attention à la mutation que l'on va activer si on est possède déjà, car une mutation qui touche les pattes des créatures remplacera la mutation déjà en place à cet endroit.

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Rouler, sauter, explorer, recommencer

Ce qu'offre Eternal Cylinder en termes de gameplay et de mécaniques est extrêmement agréable même si le tout tend régulièrement vers le « trop » sans toutefois ne jamais dépasser la limite. Tout au long de l'aventure on nous introduit à de nouvelles possibilités, que ce soit lors d'un combat de boss, d'un donjon à énigmes ou lors d'un événement de scénario. S'il est possible de ressentir au début un trop-plein d'informations, le jeu nous laisse tout de même le temps de nous habituer et on se rend compte, au bout d'un moment, que chaque brique s’emboîte globalement bien.

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Les temples sont des sortes de donjons aux puzzles pas bien compliqués
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Rencontrer des anciens à la fin des temples permet d'avoir un nouvel objectif

Par exemple, on pourrait avoir peur de la répétitivité du jeu lorsqu'on termine la première partie et qu'on a pu voir la boucle de gameplay mise en place. En gros : on vit une phase où le cylindre nous poursuit et il faut aller à une tour devant nous pour l'activer et stopper la course de l'entité. Une fois le cylindre arrêté on explore la zone générée procéduralement qui contient quasiment à chaque fois au moins un point d'intérêt, que ce soit un sanctuaire qui abrite un ancien - de vieux Trebhums qui attendent de nous transmettre leur savoir et de nous dire quoi chercher ensuite, dernières paroles avant leur mort inévitable par le cylindre -, un temple où il est possible d'améliorer ses jauges, un point de stockage et de récupération de Trebhums ou une mission de l'histoire.

Puis, on traverse le champ de force qui nous protégeait et le cylindre reprend sa course, nous obligeant à nous rendre le plus vite possible à la tour suivante en faisant attention à notre jauge d'endurance à la Breath of the Wild qui se vide rapidement lorsqu'on fait rouler les créatures pour aller plus vite, et ainsi de suite, avec quelques variations cependant (le cylindre qui en fait ne s'arrête pas à la tour, une apparition du Mathématicien qui vous mettra des bâtons dans les roues...).

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Echapper au cylindre est plus stressant que compliqué

Mais la découverte constante des environnements, la recherche des mutations et des ressources vitales ainsi que l'envie de mieux comprendre l'histoire du jeu (assez cryptique et ouverte aux interprétations) nous motivent à chaque fois à recommencer la boucle de gameplay avec plaisir, le tout accompagné d'une fluidité très agréable. On regrette cependant les quelques approximations du gameplay lors des phases de plate-forme ou dans les cavernes souterraines étroites qui viennent mettre à mal le gameplay taillé pour les zones larges en extérieur du jeu. Rien de bien méchant, mais cela entraîne quelques ratés frustrants, qui le sont encore plus lorsqu'on joue contre la montre (par exemple dans une salle remplie d'eau glaciale qui fait à la fois baisser rapidement l'endurance des Trebhums mais aussi leur barre de vie).

Le level design, bien que globalement réussi, souffre lui aussi parfois de moments faibles nous faisant nous gratter le crâne à plusieurs occasions pour savoir par où passer pour récupérer des récompenses cachées qui nous seront utiles. Là encore, lorsqu'on joue contre la montre, cela peut devenir embêtant. Heureusement, le système de sauvegarde très permissif laisse une grosse marge d'erreur.

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Pour battre le level design, il faut utiliser les bonnes mutations mises à notre disposition

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The Eternal Cylinder, l'avis de JVFR

Constamment à la limite du « trop » : trop long, trop d'éléments, trop d'ennemis ; The Eternal Cylinder ne la franchit cependant jamais et nous offre en conséquence une expérience aussi originale qu'agréable. Bien évidemment, et vous l'aurez compris, la direction artistique y est pour beaucoup, mais la proposition plus globale du jeu d'ACE Team est d'une qualité telle qu'on en ressort avec une véritable impression d'avoir été transporté.

Les développeurs chiliens nous offrent un voyage unique dans LEUR univers. Et cet univers ne plaira pas à tout le monde malheureusement. En nous proposant des choix radicaux de design et de gameplay, le studio joue à un jeu de pile ou face. Pile, tu adores la tronche du jeu, face, tout t'angoisse. Mais qu'on apprécie ou pas la proposition, il est tout de même difficile de dire qu'elle n'est pas unique et qu'elle n'apporte pas un vent de fraîcheur et d'originalité dans un monde du jeu vidéo ultra concurrentiel et bouché. Si vous voulez voyager et prendre une claque de bizarrerie, alors laissez-lui sa chance et vous ne le regretterez pas.

The Eternal Cylinder

8

The Eternal Cylinder surprend par un design aussi original que farfelu mais en laissera certains sur le carreaux malgré une proposition de gameplay et de mécaniques, amenées par les mutations, aussi complète que maîtrisée. Une nouvelle perle à explorer.

Les plus

  • Le design des créatures
  • Les possibilités offertes par les mutations
  • Une histoire prenante
  • L'un des jeux les plus originaux de l'année

Les moins

  • Le gameplay parfois approximatif
  • Trop d'ennemis
  • Peu de challenge offert par les puzzles
JVFR

The Eternal Cylinder

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