Test d'Assassin's Creed Unity : Des têtes vont tomber (et pas que dans le jeu)
Depuis son annonce « leakée » en grande pompes, AC Unity a fait couler pas mal d'encre. Annoncé comme une révolution par Ubisoft, ce nouvel épisode avait de quoi faire saliver. A en croire les « trouzmille » trailers dispensés par Ubi du moins.
Replay Web TV - Présentation du jeu
Sans entrer plus dans le détail du scénario, et spoiler allégrement, une remarque s'impose une fois l'aventure terminée. Où est l'histoire avec un grand H ? Comme précisé un peu plus haut, ce qui faisait la force des précédents épisodes, c'était ce sentiment de vivre l'Histoire, l'implication de notre personnage dans des événements qui nous dépassent, et qui ont façonné le Monde tel que nous le connaissons. Ici, et malgré les promesses d'Ubisoft, force est de constater que ce souffle épique manque à l'appel. Le cœur du jeu se déroule entre 1791 et 1794, or à ce moment-là, les feux de la Révolution se sont déjà calmés : La Bastille est tombée, le Roi est déjà en prison, bref, on est loin de vivre la Révolution de l'intérieur, pour se cantonner à des événements annexes, et souvent moins haletants. Et c'est bien dommage, car même si l'histoire se laisse suivre, il lui manque un je ne sais quoi qui l'aurait rendu formidable, épique, et marquante. Quant à la métahistoire, mieux vaut ne pas en parler tant cette partie, pourtant capitale, s'est vue réduire à la portion congrue. Sortie de deux cinématiques et demie et de trois pistes audio, nous n'en apprendrons pas plus sur les machinations d'Abstergo. Dommage.
Ce travail d'une grande qualité sur la ville se trouve par ailleurs renforcé, et mis en valeur par les nombreuses activités annexes offertes par le jeu, et qui introduisent, Ô joie, un paquet de nouveautés. Ces missions, plus ou moins scénarisées, se basent toutes sur des événements, mythes ou autres racontars de la période révolutionnaire et leur agrégation vient dresser un portrait tout à fait délicieux du Paris de cette époque. Prenons les missions d'Enquêtes par exemple. Ces dernières vous demanderont d'inspecter une scène de crime donnée, comme le meurtre de Marat pour n'en citer qu'un, à la recherche d'indices. Après avoir analysé les preuves, et interrogé les suspects, il faudra accuser le coupable pour le livrer aux autorités. S'il ne s'agit là que d'un exemple parmi tant d'autres, ces petites saynètes de la vie quotidienne se multiplient, et s'inscrivent parfaitement dans la trame générale pour constituer un tout cohérent. Et si nous oublierons rapidement l'existence des failles Hélix, aussi sympathiques que courtes et anecdotiques, nous saluerons en revanche le travail effectué sur les énigmes de Nostradamus, qui provoqueront à n'en pas douter quelques creusages de ciboulots avant d'être résolues. Au final, entre le gigantisme de la ville en elle-même et la multiplicité des activités annexes (et son milliard d'objets à récolter), les raisons de se perdre dans les rues de Paris sont bien là, et ce sera toujours avec grand plaisir que l'on y retournera.
En plus de ces missions, qui s'avèrent à l'usage assez sympathiques (pour peu que l'on joue avec ses amis et que l'on puisse communiquer), possibilité est donnée au joueur d'explorer librement Paris en meute. Si cela n'a pas d'intérêt en tant que tel, sauf celui de zoner avec quelques potes, la possibilité de créer un club d'Assassins ouvre tout un tas de possibilités assez sympathiques ; la principale étant d'accomplir des défis ensemble afin de glaner quelques bonus pour son personnage (comme un bonus de point de crédos par exemple). Il est à noter que les Clubs d'Assassins pourront à terme s'affronter entre eux, mais cette fonctionnalité étant pour le moment désactivée, nous n’en connaissons pas les modalités. Sans être particulièrement nouvelle, ou totalement révolutionnaire, cette composante multijoueur permet, à l'instar des missions annexes évoquées précédemment, de varier les plaisirs, et surtout, de s'offrir une petite respiration entre deux explorations solitaires. De plus, les gains apportés par chacune des réalisations de ce mode de jeu viendront renforcer l'expérience solo, de telle sorte que l'on ne perd jamais son temps dans Unity.
À commencer par la course libre qui gagne en sus de son aspect grimpette, un équivalent pour la descente. Dans les faits, et pour la faire courte, il suffit désormais de maintenir la gâchette droite ainsi que le bouton B pour regagner le sol rapidement depuis les hauteurs. Autre utilité de cette fonctionnalité, la fluidification de la course au sol. En maintenant lesdites touches, Arno franchira plus facilement les obstacles bas sans aller se jucher sur le premier tabouret venu. Une bonne idée donc, mais qui trouve vite ses limites dans les faits. Bien souvent, notre ami assassin se retrouvera à sauter dans le vide, à buter contre des planches dépassant du sol ou aller se plaquer contre le premier arbre venu. Des problèmes récurrents de la franchise qui ne manquent pas de venir faire fulminer les habitués de la saga.
Au titre des nouveautés, on peut aussi souligner l'entrée en lice de vraies mécaniques d'infiltration. Dès que l'on presse la gâchette de gauche, Arno s'accroupit pour se déplacer plus silencieusement. Ajoutons à cela la possibilité de se mettre à couvert derrière des éléments du décor pour compléter un tableau fort sympathique. Cependant, là encore, le bât blesse, puisque non seulement le système de couverture s'avère imparfait (pas de possibilité de franchir un angle par exemple), mais il se trouve passablement gâché par la sempiternelle bêtise de l'IA (« Oh, un cadavre OSEF »). Pire, alors que l'infiltration est enfin là, la possibilité de transbahuter les cadavres de nos adversaires puis de les planquer dans les meules de foin, a tout bonnement disparue. Reste que cela ajoute une couche de gameplay qui manquait jusqu’alors, et qui est désormais loin d'être anodine.
Et croyez-le ou non, mais s'infiltrer sera bien souvent la meilleure solution et bourriner, le dernier recours. Les combats ont véritablement gagné en difficulté, et les ennemis en force. Plus question de marteler le bouton d'action comme un sourd pour exécuter les manants à la chaîne. Désormais, les ennemis s'organisent, utilisent des grenades aveuglantes, et ont même l'outrecuidance de vous frapper lorsque vous êtes à terre.
À tel point que gérer plus de trois adversaires confine au suicide. Et cela fait du bien, car voici un aspect tactique bienvenu, même si au final, et surtout vers la fin du jeu, montée en puissance oblige, se débarrasser des adversaires devient un brin plus simple. Pourquoi me direz-vous ? Et bien tout simplement parce dans cet Unity, notre personnage connaît une vrai progression.
Finies les « compétences » débloquées par le scénario. Maintenant, il faut vraiment réfléchir à son personnage, et à la manière dont on joue pour le modeler. Après chaque mission principale, ou chaque mission coop, des points de Sync. à utiliser pour acheter des compétences nous seront remis. Attaque, défense, discrétion ou portée (attaque à distance) seront à l'ordre du jour, et il faudra consciencieusement peser le pour et le contre à chaque achat. Ainsi, il faudra choisir quel type d'arme on souhaite favoriser et quelle attaque débloquer (double assassinat, bousculade, etc.) pour coller au mieux à son style de jeu. Et cela ne s'arrête pas là, puisque l'équipement n'est plus uniquement cosmétique, mais se pare de nombreuses compétences, là encore pour personnaliser son avatar en fonction de son style de jeu. Une nouveauté au final fort sympathique, et surtout, parfaitement adaptée aux missions multijoueur.
Un malheur n'arrivant jamais seul, abordons maintenant la question du framerate. Que dire si ce n'est que ses sautes constantes viennent ruiner le travail - par ailleurs excellent - réalisé sur les animations d'Arno. Et c'est bien dommage, car il est particulièrement frustrant de voir le personnage virevolter sur les toits en sautant parfois une étape dans son animation ou pire, en réinitialisant cette dernière en plein vol. Dernière touche à ce bien sombre tableau, les nombreux bugs qui jalonnent chacune de nos excursions parisiennes. Entre plantage complet du jeu, passants perchés sur les toits et autres manques de textures, l'habituel panoplie made in Ubisoft est de la partie, et ce, malgré le patch d'un giga octet téléchargé avant la sortie. Et l'on touche sans doute ici le problème principal d'Unity qui paie la politique de communication mensongère agressive d'Ubisoft. Au final, là encore, Unity s'avère particulièrement frustrant. Car au travers des bugs et des errances techniques, il est possible de déceler, par bribe, la véritable beauté de cet Assassin.