Test Fahrenheit (PS2, Xbox) : 7/10 sur JeuxVideo.fr

David Cage et QuanticDream nous proposent, quelques années après The Nomad Soul (1999), de vivre une nouvelle aventure. On peut donc s'attendre à quelque chose d'innovant et surtout ne se rapprochant pas des productions actuelles. Après avoir vu de nombreuses images ces derniers mois, je vais enfin pouvoir jouer et vous livrer mes impressions.

Lucas Kane est un New-Yorkais comme les autres. Métro-boulot-dodo font partie intégrante de sa vie. Nous sommes début janvier et Lucas s'arrête dans un petit restaurant. Jusqu'ici tout va bien. Il se rend aux toilettes et se retrouve d'un coup possédé. Il avance d'un pas chaotique vers un homme et le poignarde. Puis tout redevient normal et Lucas se retrouve avec ce corps et les mains tachées de sang. Que faire ? Où aller ? On prend enfin le contrôle du personnage et déjà le stress nous gagne. Plusieurs choix sont disponibles : cacher le corps, fuir par la fenêtre, retourner dans la salle finir son repas… David Cage a basé son jeu sur le principe des choix. On est en quelque sorte dans un "livre dont vous êtes le héros". Finis tous ces jeux d'aventures où l'on bloque devant une énigme. Ici, il y aura toujours plusieurs possibilités, mais il faudra réagir rapidement.

Avant de vous lancer dans l'aventure, vous pourrez passer par le tutoriel. Petit moment très sympa car c'est David Cage lui-même (enfin plutôt modélisé) qui nous aide à appréhender les premiers mouvements. On a devant les yeux un titre qui sort du commun. Il s'agit d'une aventure policière où l'on joue à la fois le criminel et les enquêteurs. Chacun cherchant à leur façon la vérité. De la même manière, les évènements se ressentiront de façons différentes selon le protagoniste utilisé. Par exemple au début, Lucas tue un homme mais on ne voit pas où il pose l'arme du crime et ensuite on joue le rôle de Claire et c'est elle qui retrouve le couteau. Petit à petit, le puzzle se met en place. L'aventure s'enfonce petit à petit dans le fantastique avec Lucas qui a des visions, des migraines et surtout voit très souvent un corbeau. Devient-il fou ? Carla Valenti et Tyler Miles réussiront-ils à élucider ce meurtre ? Fahrenheit se vit plus qu'il ne se raconte. Il faut y jouer pour pouvoir pleinement saisir l'essence même du scénario.

Les personnages se contrôlent avec le stick analogique gauche. Celui de droite est un prolongement du corps. Je m'explique : dès que l'on peut effectuer une action, il suffit de pousser le stick dans la direction concernée. Je veux m'asseoir, je tire vers le bas comme indiqué dans la partie haute de l'écran. On retrouve des évènements chers à Shenmue : les QTE (Quick Time Events). Il va falloir reproduire des séquences de couleur. Les deux sticks sont mis à contribution. Autopsie, combat, match de basket, jouer de la guitare, sont quelques-uns des différents exemples gérés par les QTE. Le cheminement est le même pour toutes ces actions. C'est une très bonne idée mais qui s'avère répétitive car trop fréquente. On prend quand même du plaisir à exécuter ces mouvements et à voir le mot "réussi" s'afficher à l'écran.La volonté de nous plonger au cœur d'un film avec des caméras qui changent souvent d'angle rend la jouabilité bancale. On avance au milieu d'une pièce et soudain la vue change d'angle et hop, sans le faire exprès, on retourne sur nos pas. Cela s'avère assez frustrant surtout que la manette est très bien configurée et que réaliser les diverses actions ne pose aucun problème. En plus des QTE vus plus haut, il faut par moment marteler sur les boutons de tranche afin d'aider les personnages à réaliser leurs efforts physiques. Il faut être assez endurant et ne pas avoir peur de marteler la manette. On se croirait dans Track and Field !

La touche graphique de Fahrenheit est plutôt angoissante. Au fur et à mesure que l'on avance dans le jeu, les décors se font de plus en plus ésotériques. Il est bien évident que les visages ont été mieux travaillés que certains décors. Cela nous permet de mieux ressentir les sentiments que Lucas, Clara ou Tyler peuvent ressentir. Certains intérieurs provoquent quelques moments d'angoisse, de peur. Mais tous n'ont pas été logés à la même enseigne. La laverie automatique est plutôt banale tandis que les appartements d'Agatha et Lucas (à un certain moment du jeu) sont terrifiants et cela, grâce à des décors bien travaillés.La musique colle bien à l'ambiance assez calme. Je dirais un calme oppressant. Les différents thèmes musicaux sont plutôt cool et vont de l'orchestre avec violons jusqu'à des titres beaucoup plus jazzy ou [logiciel:10181 Groove]. Cela varie selon le personnage que l'on utilise. On peut aussi jouer avec sa guitare ou écouter la radio. Cela permet de varier les plaisirs. Les voix françaises sont bien travaillées. Le reflet des personnalités ainsi que leurs angoisses ou envies se reflètent dans leurs voix.Ce qui rend Fahrenheit différent des productions actuelles est son aspect cinématographique. Le jeu de caméra, la coupure de l'écran façon 24 Heures Chrono, les combats et les ralentis à la Matrix ainsi que divers autres éléments, tirés du cinéma fantastique lesquelles nous plongent au sein d'une sorte de film interactif. On ne vit pas l'aventure comme on jouerait à n'importe quel autre jeu. On subit les angoisses, les craintes et la recherche de la vérité comme si on était réellement impliqué. D'ailleurs, une icône représentant le personnage se situe en bas à droite de l'écran. En fonction de votre avancée dans le jeu, il gagne ou perd des points et passe ainsi de "stressé" à "anxieux", ou encore "tendu". Cela peut même conduire jusqu'à la déprime, la folie ou au suicide.

Fahrenheit nous procure un excellent moment de jeu et surtout de nombreuses montées d'adrénaline. David Cage nous propose une nouvelle expérience de jeu. Pouvoir jouer trois personnages différents (un criminel et deux enquêteurs), mais qui sont à la recherche de la même chose (la vérité) donne une véritable bouffée d'air frais au monde vidéo ludique. On suit les pérégrinations de Lucas et consorts avec le sentiment d'être vraiment au cœur de l'action. Fahrenheit n'est pas pour autant exempt de défauts, mais on est tellement pris par le scénario et par l'envie d'avancer qu'on les oublie vite. À essayer d'urgence et à vivre à sa manière afin de tirer la quintessence de ce jeu.