Test de Ico & Shadow of The Colossus Classics HD
Deux chefs d'oeuvre immortels dépoussiérés et réunis sur une même galette : l'achat indispensable ?
Mine de rien, cela fait déjà dix ans que Fumito Ueda, Kenji Kaido et leurs acolytes du SCE Japan Studio ont marqué l'Histoire du jeu vidéo avec la sortie du superbe Ico, puis quatre ans plus tard avec le monumental Shadow of The Colossus. Devenu en l'espace de deux titres un des studios les plus acclamés par les joueurs et la critique, la Team Ico voit ses deux chefs d’œuvre réédités sous forme d'une compilation HD ... soit l'intégralité de sa ludographie. Si ça n'est pas ce qu'on appelle une consécration ...
S'il est aujourd'hui unanimement considéré comme un chef d’œuvre, Ico n'a pas connu un début de carrière tonitruant. Comme beaucoup d'autres œuvres devenues cultes, Ico a surtout connu un succès d'estime. A peine 650 000 copies vendues avant sa réédition en 2006, ça n'est pas ce qu'on peut appeler un carton commercial. Mais en dépit de sa relative confidentialité, il s'est petit à petit imposé comme un classique incontournable de la PlayStation 2 et, plus généralement, comme l'un des plus grands titres de ce début de siècle.
Il faut dire que son génial créateur, Fumito Ueda, s'est soigneusement employé à prendre à contre-pieds toutes les tendances de game-design actuelles en jouant la carte du minimalisme. Un seul et unique lieu, deux personnages, aucun HUD et quasiment aucune indication à l'écran, un environnement sonore principalement peuplé de bruitages d'ambiances, bref un game-design épuré. L'intention derrière ce parti pris est simple et parfaitement concrétisée : impliquer au maximum le joueur et ne surtout pas détourner son attention de ce qui se joue à l'écran - la relation entre Ico et Yorda, la fragilité de leur condition - avec du superflu.
Et c'est bien cette intention et les moyens qui l'accompagnent qui font que Ico n'est pas qu'un simple jeu d'action / exploration. La relation d'entraide qui se construit entre Ico est Yorda et l'implication émotionnelle du joueur qu'elle parvient à susciter est une des plus grandes réussites du jeu. Par la force d'un dialogue uniquement corporel, de petites attitudes témoignant de la vulnérabilité de Yorda, du gigantisme écrasant de la citadelle mise en valeur par le truchement de perspectives audacieuses, l'association de ce courageux gamin et de cette fragile et mystérieuse jeune fille dans cette fuite désespérée a quelque chose de profondément émouvant.
Et la beauté de la chose c'est que cette relation ne nous est pas racontée à l'aide de cut-scenes accompagnées de grandes envolées pathétiques au violon : c'est bien le joueur qui s'attache à Yorda. Au sens propre comme au figuré d'ailleurs car il devient vite très difficile de lui lâcher la main le temps de trouver un moyen lui permettant de franchir un obstacle. Chaque séparation nous plonge immanquablement dans un état d'inquiétude. Et quand les spectres noirs surgissent pour s'emparer d'elle, la révolte sonne pour Ico comme pour le joueur devant son écran. « Jamais nous ne l'abandonnerons à ce funeste sort » semblent-ils dire de concert. Les scènes de combat se résument à des gesticulations chaotiques et Ico a parfois des airs de petit forcené. Qu'importe la beauté du geste, ici il est uniquement question de sauver Yorda.
Ico offre une quête, certes courte - environ 7h de jeu - mais qui n'a rien perdu de sa puissance évocatrice. On aurait pu craindre que cette réédition HD lui porte préjudice comme cela a pu déjà être le cas pour d'autres titres. Mais il n'en est rien. S'il ne faisait pas partie des titres de l'époque les plus impressionnants techniquement parlant, Ico a gardé pour lui une finition quasi-irréprochable. Dès lors son passage à la haute définition ne vient pas mettre en avant de petits ratés qu'un affichage plus grossier nous aurait caché à l'époque. Le jeu demeure étonnamment propre mais ne souffre pas pour autant d'une netteté exagérée ou de filtres superflus défigurant sa splendide direction artistique. Le titre y gagne même quelque chose puisque sa bande-son se trouve revigorée par un Dolby Digital de bon aloi.
Afin de ramener à la vie Mono, une jeune fille manifestement sacrifiée à cause d'une malédiction l'ayant frappée, le jeune Wander - ou Wanda - s'aventure dans les terres interdites où Dormin, une mystérieuse entité habitant un gigantesque temple, lui offre son aide à la condition que Wander abatte un à un les seize colosses arpentant les vastes terres environnantes. Mais il ne manque pas de le prévenir : chaque victoire de Wander aura des conséquences et le prix pour ramener Mono à la vie sera lourd à payer.
N'écoutant que son courage, le jeune homme se lance donc à l'assaut des titanesques créatures. Dans sa structure, Shadow of The Colossus n'est finalement rien d'autre qu'une succession de combats de boss. Mais le réduire à cela serait une grave erreur de jugement. SOTC est une quête désespérée alternant l'errance de Wander et sa monture Agrod sur des terres dépeuplées et battues par le vents avec des duels épiques et même tragiques.
Le monde dans lequel a pénétré Wander est vaste, immense même. Mais en dehors de quelques oiseaux volant dans le lointain ou de lézards fuyant sur son passage, c'est un monde vide et indifférent à sa présence. Un monde qui semble exister depuis des temps immémoriaux. Il en résulte un sentiment de solitude assez poignant.
Là encore, la Team Ico met en œuvre les mêmes principes de game-design que pour Ico : un monde vaste et vierge de toute présence humain en dehors de quelques antiques vestiges, peu de musiques et le bruissement du monde pour seul environnement sonore, un HUD minimal et comme seul instrument de navigation pour le joueur, le faisceau de lumière projeté par son épée lorsqu'il l'a brandit. Les perspectives vertigineuses que dessine la caméra sur l'immensité de cet univers et ses placements souvent décalés sur l'horizon accentuent encore le sentiment de n'être que bien peu de chose.
Wander fait intrusion et il est en quelque sorte le petit élément perturbateur qui va bouleverser l'ordre des choses. Ses attaques répétées contre les colosses ont quelque chose de révoltant. Qui est-il donc pour troubler ainsi leur repos ou leur errance ? La résurrection de Mono vaut-elle vraiment le massacre de ces antiques créatures ? Derrière la noblesse de sa quête, Wander n'est pas vraiment ce qu'on pourrait appeler un chevalier blanc. Il abat un à un de paisibles colosses qui, jusqu'à ce qu'il se mette à les harceler, ne faisaient que demeurer en leurs terres sans se soucier du reste du monde.
L'atmosphère de SOTC est ainsi unique en son genre. Tout comme le sont ses incroyables combats contre les colosses. Portés par les compositions magistrales de Kow Otani, ces affrontements ont quelque chose de complètement fou. Wander doit commencer par trouver un moyen de gravir leurs majestueuses silhouettes faites de matières minérales et organiques, puis s'y accrocher coûte que coûte en dépit de leurs soubresauts. Leur infliger le moindre coup d'épée est une lutte de chaque instant. Voir cette petite chose insignifiante se battre comme un diable pour ne serait-ce que rester au contact de son titanesque adversaire a quelque chose d'authentiquement héroïque.
Alors certes la plupart des duels s'avèrent somme toute assez faciles, mais quel souffle épique ! Quelle vibrante poésie guerrière ! SOTC permet de vivre tant de moments de bravoure que ses quelques impairs sont vite relégués au second plan. Car le titre de la Team Ico n'est pas non plus parfait. La maniabilité d'Agro est ainsi relativement crispante, tandis que la caméra a parfois un peu de mal à suivre l'action. On retrouve également le même clipping que dans le titre originel. En revanche, cette réédition HD corrige l'un des plus gros points faibles de la version PlayStation 2, à savoir ses fréquentes et vertigineuses chutes de frame-rate. De plus, tout comme pour Ico, ce lifting HD s'avère irréprochable en respectant la direction artistique de l'orignal.






Ico, plus qu'un jeu une icôneRetour au sommaire

Il faut dire que son génial créateur, Fumito Ueda, s'est soigneusement employé à prendre à contre-pieds toutes les tendances de game-design actuelles en jouant la carte du minimalisme. Un seul et unique lieu, deux personnages, aucun HUD et quasiment aucune indication à l'écran, un environnement sonore principalement peuplé de bruitages d'ambiances, bref un game-design épuré. L'intention derrière ce parti pris est simple et parfaitement concrétisée : impliquer au maximum le joueur et ne surtout pas détourner son attention de ce qui se joue à l'écran - la relation entre Ico et Yorda, la fragilité de leur condition - avec du superflu.
Vidéo-Test de Ico & Shadow of The Colossus
« L'association de ce courageux gamin et de cette fragile et mystérieuse jeune fille dans cette fuite désespérée a quelque chose de profondément émouvant. »

Et la beauté de la chose c'est que cette relation ne nous est pas racontée à l'aide de cut-scenes accompagnées de grandes envolées pathétiques au violon : c'est bien le joueur qui s'attache à Yorda. Au sens propre comme au figuré d'ailleurs car il devient vite très difficile de lui lâcher la main le temps de trouver un moyen lui permettant de franchir un obstacle. Chaque séparation nous plonge immanquablement dans un état d'inquiétude. Et quand les spectres noirs surgissent pour s'emparer d'elle, la révolte sonne pour Ico comme pour le joueur devant son écran. « Jamais nous ne l'abandonnerons à ce funeste sort » semblent-ils dire de concert. Les scènes de combat se résument à des gesticulations chaotiques et Ico a parfois des airs de petit forcené. Qu'importe la beauté du geste, ici il est uniquement question de sauver Yorda.

Un garçon nommé WandaRetour au sommaire
Sorti en 2005, Shadow of The Colossus a longtemps été présenté comme une suite à Ico. Son nom de code était d'ailleurs Project Nico. Mais Fumito Ueda l'a plutôt présenté comme une sorte de prélude à Ico et les deux titres partagent une filiation évidente en terme de direction artistique. 
N'écoutant que son courage, le jeune homme se lance donc à l'assaut des titanesques créatures. Dans sa structure, Shadow of The Colossus n'est finalement rien d'autre qu'une succession de combats de boss. Mais le réduire à cela serait une grave erreur de jugement. SOTC est une quête désespérée alternant l'errance de Wander et sa monture Agrod sur des terres dépeuplées et battues par le vents avec des duels épiques et même tragiques.
Le monde dans lequel a pénétré Wander est vaste, immense même. Mais en dehors de quelques oiseaux volant dans le lointain ou de lézards fuyant sur son passage, c'est un monde vide et indifférent à sa présence. Un monde qui semble exister depuis des temps immémoriaux. Il en résulte un sentiment de solitude assez poignant.

Gameplay #2 - SOTC : le 15ème colosse
« SOTC permet de vivre tant de moments de bravoure que ses quelques impairs sont vite relégués au second plan »
Wander fait intrusion et il est en quelque sorte le petit élément perturbateur qui va bouleverser l'ordre des choses. Ses attaques répétées contre les colosses ont quelque chose de révoltant. Qui est-il donc pour troubler ainsi leur repos ou leur errance ? La résurrection de Mono vaut-elle vraiment le massacre de ces antiques créatures ? Derrière la noblesse de sa quête, Wander n'est pas vraiment ce qu'on pourrait appeler un chevalier blanc. Il abat un à un de paisibles colosses qui, jusqu'à ce qu'il se mette à les harceler, ne faisaient que demeurer en leurs terres sans se soucier du reste du monde.

Alors certes la plupart des duels s'avèrent somme toute assez faciles, mais quel souffle épique ! Quelle vibrante poésie guerrière ! SOTC permet de vivre tant de moments de bravoure que ses quelques impairs sont vite relégués au second plan. Car le titre de la Team Ico n'est pas non plus parfait. La maniabilité d'Agro est ainsi relativement crispante, tandis que la caméra a parfois un peu de mal à suivre l'action. On retrouve également le même clipping que dans le titre originel. En revanche, cette réédition HD corrige l'un des plus gros points faibles de la version PlayStation 2, à savoir ses fréquentes et vertigineuses chutes de frame-rate. De plus, tout comme pour Ico, ce lifting HD s'avère irréprochable en respectant la direction artistique de l'orignal.
Conclusion
Bien sur, Ico & Shadow of The Colossus Classics HD aurait mérité des bonus supplémentaires et pas simplement quelques trophées accompagnées d'une option 3D stéréoscopique. Et tant que nous y sommes, deux monuments inoubliables comme ceux-là devraient nous être proposés dans un packaging en platine serti de joyaux. Mais il faut saluer cette réédition HD. Non seulement pour les bienfaits qu'elle apporte, en particulier à SOTC, mais aussi pour sa fidélité sans faille à la plastique des originaux. De joueur à joueurs : passer à côté de ces deux chefs d’œuvre à l'époque de leur sortie pouvait se comprendre ; les ignorer à nouveau aujourd'hui mériterait une douloureuse punition corporelle en plus de vous priver de deux fantastiques moments de jeu vidéo... de ceux qui ne vous quitteront jamais. Parole.





( les afficher maintenant )